Laetitia Bernard, le sport me parle

Le sport me parle


LAETITIA BERNARD

Comment est venu votre amour pour le sport ?
Dès que je suis née car tout le monde est sportif dans ma famille. Très rapidement j’ai pratiqué la natation, le ski et je me suis mise à regarder les retransmissions des grands événements à la télévision. J’ai ensuite commencé l’équitation vers 12-13 ans sans me poser de questions sur la difficulté ou non de monter à cheval. J’ai rapidement fait de la compétition, d’abord par curiosité puis par passion. Depuis toujours, le sport fait partie de ma vie au quotidien, je ne peux pas m’en passer.

Pouvez-vous nous retracer votre parcours en tant que journaliste ?
Après mon bac littéraire en 2001, j’ai obtenu le diplôme de l’Institut d’Etudes Politiques de Strasbourg en 2005 puis j’ai intégré le Centre de Formation de Journalistes de Paris en décrochant une bourse destinée aux personnes au profil « atypique ». J’ai fait quelques piges pour la presse écrite équestre mais c’est vraiment en 2007 que je commence ma carrière en faisant mon premier remplacement à Radio France. Je deviens titulaire en 2010 et intègre la rédaction sportive en 2015 où je présente notamment les journaux sportifs du matin le week-end. J’ai toujours eu l’amour de la radio, je suis donc comblée.

Quand avez-vous décidé d’en faire votre profession ?
Je n’ai jamais pensé être journaliste au début de mes études, je me suis plutôt laissée guider par mon tempérament. Suite à mon parcours à l’IEP de Strasbourg, j’aurai pu travailler pour l’Europe sur la question du handicap mais la femme handicapée qui s’occupe d’un tel sujet, cela aurait fait un peu cliché. J’ai préféré me tourner vers le journalisme et je pense que ma fonction à Radio France de journaliste à part entière a plus de poids dans la façon de considérer les personnes en situation de handicap.

Comment parler de sport quand on ne voit pas ?
Il est bien évident que je ne peux pas commenter un match ou une course en direct. Mais faire une présentation, une analyse, un compte-rendu quand on se renseigne bien en amont, quand on va chercher l’info correctement ce n’est pas une tâche plus dure pour moi que pour une personne voyante. Mon passé de compétitrice me permet également de connaître les sensations des personnes ou des événements dont je parle, je pense donc être pertinente quand je m’intéresse à un sujet.

À quels obstacles avez-vous dû faire face et comment les avez-vous surmontés ?
J’ai connu les difficultés que toute personne en situation de handicap peut rencontrer sur des détails du quotidien, et dans mon travail on repousse sans cesse les limites, notamment du côté des adaptations informatiques. Heureusement, la mission handicap de Radio France m’épaule au maximum et s’implique pour que je puisse bénéficier des bons outils médias.

Vous pratiquez l’équitation en saut d’obstacles depuis longtemps, pouvezvous nous raconter vos sensations ?
Au début, on ne sait pas trop où on est bien sûr, on est dérouté. Puis progressivement on est à l’écoute de son cheval qui vous fait sentir qu’un obstacle se présente à lui, on se positionne alors d’une certaine manière, on se place. On écoute également les crieurs postés à chaque obstacle. La suite est une question d’habitude et de concentration. Au niveau des chutes, il n’y en a pas plus en handisport que chez les valides.

Que vous apporte la pratique sportive dans votre vie de tous les jours ?
J’ai de moins en moins de temps pour sauter à cheval mais je fais beaucoup de vélo, de course à pied, de yoga. J’ai besoin de faire du sport pour me dépenser, apprendre sur moi et me donner de l’énergie. Le sport me parle.

Vous êtes une fidèle journaliste présente lors des Jeux Paralympiques, quel est votre meilleur souvenir ?
Je dirai les derniers Jeux Paralympiques d’hiver à PyeongCheang, dans leur ensemble. Déjà les jeux d’hiver sont plus petits donc plus conviviaux, ensuite il y a eu beaucoup de médailles et des sportifs très abordables, ce qui est très agréable pour un journaliste. Enfin, avec l’expérience je gère mieux le travail à réaliser ce qui m’a peut-être également permis de mieux aborder ces jeux.

Comment jugez-vous la médiatisation du Handisport en France ?
Depuis les Jeux d’été de Londres en 2012, la médiatisation a pris de l’ampleur. C’est interactif car on s’y intéresse plus mais aussi parce que la FFH communique mieux. C’est vrai que la presse généraliste ne donne pas beaucoup de places aux événements handisport mais malgré tout elle y pense, en y consacrant quelques articles quand l’actualité est là. La sensibilisation du grand public est bien plus importante depuis quelques années, le handicap et le handisport commencent à entrer dans l’esprit des gens comme un sujet classique et non tabou, à faire partie du « paysage social ».

Comment jugez-vous la considération de la presse sportive pour les athlètes handisport ?
Quand il y a des médailles ou de belles histoires à raconter, c’est forcément plus porteur. Mais qui échappe à cela ? Il faut bien sûr insister sur la performance sportive avant l’exploit humain, mais quand on parle Handisport dans la presse grand public, il faut parler de la personne également car il y a alors un regain d’intérêt, c’est ainsi. Cela permet de toucher un plus large public, de faire passer des messages, des témoignages de vie. En tant que journaliste, il faut savoir trouver l’équilibre. // Propos recueillis par R. Goude

 

Bio & repères


LAETITIA BERNARD

© E. Haberer
Laetitia Bernard

  • Née le 9 avril 1983 à Gien (45).
  • Non voyante de naissance.
  • 1995 : Débute la compétition de saut d’obstacle.
  • 1997-1998-2000-2002-2005 : Championne de France de saut d’obstacles dans la catégorie handicap visuel.
  • 2007 : Vainqueur de la finale de la Coupe de France de saut d’obstacles handisport.

Études

  • 2001 : Bac littéraire
  • 2005 : Diplôme de l’Institut d’Etudes Politiques de Strasbourg.
  • 2007 : Diplôme du Centre de Formation des Journalistes de Paris.


Parcours Professionnel

  • 2007 : Entre comme pigiste à Radio France
  • 2010 : Devient titulaire chez Radio France
  • Depuis 2012 : Couvre les Jeux Paralympiques pour Radio France
  • 2015 : Intègre le service des sports de Radio France